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Bérengère DENIS, avocat en droit public à Lyon

Bérengère DENIS
Avocat à Lyon
 

Bérengère DENIS, avocat en droit public à Lyon

Détenu : comment contester son placement à l'isolement en référé


Les personnes incarcérées peuvent être placées à l'isolement soit à leur demande, soit à la demande de l'administration (notamment par le centre pénitentiaire). Le code pénitentiaire prévoit en effet en son article L213-8 : 

"Toute personne détenue majeure peut être placée par l'autorité administrative, pur une durée maximale de trois mois, à l'isolement par mesure de protection ou de sécurité soit à sa demande, soit d'office. Cette mesure ne peut être renouvelée pour la même durée qu'après un débat contradictoire, au cours duquel la personne intéressée, qui peut être assistée de son avocat, présente ses observations orales ou écrites. L'isolement ne peut être prolongé au-delà d'un an qu'après avis de l'autorité judiciaire. Le placement à l'isolement n'affecte pas l'exercice des droits prévus par les dispositions de l'article L6 sous réserve des aménagements qu'impose la sécurité. Lorsqu'une personne détenue est placée à l'isolement, elle peut saisir le juge des référés en application de l'article L521-2 du code de justice administrative." 

 

La mesure initiale de placement à l'isolement est donc de 3 mois maximum mais elle peut ensuite être renouvelée pour la même durée par le directeur de l'établissement puis encore jusqu'à une année sur décision du directeur interrégional des services pénitentiaires puis au-delà d'un an sur décision du garde des sceaux.

 

Chacune de ces décisions peut être contestée devant le juge administratif : tant la décision initiale de placement que chaque décision de prolongation qui serait susceptible d'intervenir ensuite, mais alors comment contester utilement, quels recours introduire ? 

 

L'article L213-8 du code pénitentiaire indique expressément que le placement à l'isolement peut être contesté en application de l'article L521-2 du code de justice administrative (CJA) c'est à dire en introduisant un référé liberté. Le référé liberté est une procédure d'urgence autonome. Il n'a pas besoin d'être accompagné d'un recours au fond et le juge doit statuer dans un délai de 48 heures. Le requérant doit dans ce cas démontrer une situation d'urgence et une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale. 

 

En parallèle du référé liberté, le détenu peut également introduire un référé suspension (art L521-1 du CJA). Le référé suspension est également une procédure d'urgence mais le juge n'a pas à statuer dans les 48 heures, dans les faits cela prend généralement une dizaine de jours et il doit nécessairement être accompagné d'un recours au fond sous peine d'irrecevabilité. Là encore le détenu doit démontrer une situation d'urgence et un doute sérieux quant à la légalité de la mesure de placement à l'isolement ou sa prolongation. Cependant, et c'est là la grande différence avec le référé liberté, le Conseil d'Etat a admis dans un revirement de jurisprudence que l'urgence était en principe caractérisée du fait même de la nature de la mesure de placement à l'isolement. La condition d'urgence est donc automatiquement remplie sans que le requérant n'aie à apporter d'autres éléments, sauf à ce que l'administration parvienne à apporter des éléments contraires. Le Conseil d'Etat a ainsi jugé (CE, SSR, 7 juin 2019, n°426772) :

"Eu égard à son objet et à ses effets sur les conditions de détention, la décision plaçant d'office à l'isolement une personne détenue ainsi que les décisions prolongeant eventuellement un tel placement, prises sur le fondement de l'article 726-1 du code de procédure pénale, portent en principe, sauf à ce que l'administration pénitentiaire fasse valoir des circonstances particulières, une atteinte grave et immédiate à la situation de la personne détenue, de nature à créer une situation d'urgence justifiant que le juge administratif des référés, saisi sur le fondement de l'article L521-1 du code de justice administrative, puisse ordonner la suspension de leur exécution s'il estime remplie l'autre condition posée par cet article."

Ainsi, dans le cadre d'un référé suspension, le détenu n'a "plus" qu'à démontrer le caractère illégal de la mesure de placement à l'isolement (non respect du contradictoire, motifs non fondés sur la protection des personnes ou la sécurité de l'établissement etc). A contrario, dans le cadre du référé liberté, le Conseil d'Etat a considéré que l'urgence n'était pas caractérisée du seul fait du placement à l'isolement du détenu et il appartient donc à ce dernier de démontrer l'urgence à statuer sur sa situation  " au regard notamment de son état de santé ou des conditions dans lesquelles elle est placée à l'isolement" (CE, 11 novembre 2019, n°435785).

 

En conclusion, sauf à pouvoir démontrer effectivement et avec des éléments concrets de preuve un état de santé incompatible avec l'isolement ou des conditions d'isolement particulièrement attentatoires à la dignité, la voie du référé suspension sera à privilégier. 

 


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